Report de la manifestation et décision d’aller aux élections : le prix du sacrifice de Yewwi

Yewwi Askan Wi a reporté ses manifestations pour, entre autres, calmer le jeu le temps de la Tabaski. Elle a aussi décidé d’aller aux Législatives avec ses suppléants. Dans un contexte de la fête du mouton, on peut parler de sacrifice. Mais à quel prix ? Lecture !

Le calme, avant d’autres tempêtes ? Yewwi Askan Wi a rangé les armes dans cette bataille du terrain et de l’opinion. Jusqu’à quand ? La Tabaski a été l’un des arguments avancés aussi bien par l’Etat pour interdire la manifestation du 29, que par Yaw pour justifier son report. L’on a aiguisé les couteaux et machettes d’un côté. L’on a chargé les armes et les grenades de l’autre.

Comme si tout était fait pour faire couler le sang. Certains, qui ont déjà leur bélier, ont appelé les jeunes à les suivre comme des moutons de panurge. A être «prêts pour le sacrifice», comme si on anticipait le rituel de la Tabaski, 3 personnes, de près ou de loin mêlées à ces manifestations, sont tombées le 17 juin. Il faut bien admettre que, même si Yewwi a opéré une reculade, c’est aussi de la grandeur de ne pas foncer droit dans le mur. Mais l’on doit bien rappeler la raison de ce jusqu’au–boutisme. N’est-ce pas la participation de sa liste nationale des titulaires, invalidée ? Pour que Sonko et d’autres leadeurs sur la liste nationale des titulaires puissent siéger à l’Assemblée nationale. Ils avaient promis et juré qu’il n’y aura point de Législatives sans cette liste dont Sonko était la tête ! «Moi Barthélémy Dias, je n’irai jamais en campagne sans la liste nationale (de Yewwi). C’est une absurdité orchestrée par le ministre de l’Intérieur. Qu’il pleuve ou qu’il neige, la liste nationale prendra bien part aux élections législatives», avait soutenu le maire de Dakar. Ça ne sera finalement pas le cas. Ni Sonko ni les autres ne seront membres de la 14ème législature. Et pourtant c’était la raison de ce «don de soi», la devise des patriotes pour résister aux «manœuvres» de Macky Sall. Qui a été clair : «La loi est dure, mais c’est la loi. Le pays va tenir les élections».

Les visées de Yaw

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Reculade, capitulation, volte-face… ce qui est clair, c’est que Yewwi n’est pas une «armée» d’amateurs. Que la parole des médiateurs ait eu un écho favorable est indéniable. Mais l’expérience de Khalifa Sall, qui n’est pas éligible, n’autorise pas la naïveté de croire que c’est du pain béni pour Macky Sall et Benno Bokk Yaakaar. La fougue et la hargne d’Ousmane Sonko, «privé» d’une tribune comme celle de l’Assemblée nationale, poussent à relativiser cette «couardise» ainsi véhiculée. Ce n’est pas innocent ce repli, peut–être stratégique, pour ne pas voir ces commerçants, vendeurs de moutons, tailleurs et autres leur coller leurs éventuelles pertes ou destructions de leurs biens. Si Yewwi s’est finalement «résolue» à aller aux Législatives, donc à tourner la page de contestation du rejet de sa liste nationale des titulaires, c’est aussi, peut-être, parce qu’elle espère «imposer la cohabitation» au Président Sall.

Même si le mode de cette élection n’est pas souvent favorable à l’opposition, gagner et siéger au gouvernement. Qui sait ? Avec le schéma peaufiné dans les départements avec Wallu, c’est un scénario possible. Ce n’est pas pour rien que la majorité présidentielle bat campagne, entre les lignes, contre cette cohabitation. Et son chef lui-même ne l’exclut pas. «… Pour que cette politique puisse se poursuivre, le gouvernement doit avoir une majorité qui lui permette de ne pas perdre de temps», avait déclaré le Président Macky Sall dans son dernier entretien avec «Jeune Afrique». Il y a là un clin d’œil aux électeurs. Mais il ajoutait : «L’opposition veut une cohabitation ? Vous savez très bien que, même dans les pays développés, c’est rarement une réussite. Je ne peux imaginer un tel scénario au Sénégal. Nous sommes sous un régime présidentiel : on élit un président et on lui donne, dans la foulée, une majorité pour gouverner. Le passage du septennat au quinquennat a modifié l’ordre des choses, mais ne change rien sur le fond : le Sénégal, comme l’Afrique, a besoin de stabilité».

Elire les suppléants ou sanctionner le régime

 Yewwi y va donc avec ses suppléants, mais, au fond, pour qui voteront les Sénégalais ? Même privée de sa liste nationale avec les noms les plus connus, la coalition n’a rien perdu. C’est une campagne que mèneront les leadeurs de cette coalition, aux côtés de ceux de Wallu Sénégal, pour «vendre» leur bulletin, leurs symboles. «L’anonymat» des noms des suppléants rappelle celui de certains candidats de Yaw aux dernières Locales. Ils sont devenus maires parce que les électeurs ont sanctionné le régime.