Contribution – Réponse à Felwine Sarr (Par Docteur Abdoulaye Fall)

Contribution – Réponse à Felwine Sarr (Par Docteur Abdoulaye Fall )
Drapé de son manteau d’intellectuel qui lui confère une certaine légitimité, l’éminent écrivain Felwine Sarr a trempé sa plume dans du vitriol pour dénoncer les maux de la démocratie sénégalaise qui, dit-il, est devenue une catégorie que l’on a inexorablement vidée de son sens véritable. Qu’à cela ne tienne !
Toutefois, s’il est louable pour le penseur qu’il est, de se pencher sur les maux de sa société, force est de constater, pour s’en désoler, que son propos ressemble à s’y méprendre à celui d’un opposant dont le seul objectif est l’adhésion de la masse à sa vision. Or, le professeur disait le juge Kéba Mbaye, est un soldat de la raison qui doit s’évertuer à ne pas sortir du chemin de la science. Malheureusement, ce chemin de la science, Felwine s’en est écarté, en sortant de son orbite.
En effet, à rebours de la neutralité axiologique qui caractérise la rigueur scientifique, l’auteur de « Afrotopia », s’est adonné à une lecture tronquée de la réalité, une analyse partiale et parcellaire de celle-ci. En décidant de voir le verre à moitié vide, Felwine s’extirpe du champ de l’analyse scientifique pour arborer sa casquette de défenseur du leader de l’ex Pastef. Ce louvoiement idéologique qui passe volontairement sous silence les faits graves qui accablent ce dernier est une volonté manifeste de travestir la réalité à des fins inavouées.
Sans doute, il n’est nul besoin d’être un brillant analyste pour sentir à mille lieux l’odeur de la partisannerie qui empeste de l’article à charge de Felwine. Aucun passage de celui-ci ne mentionne la violence inouïe perpétrée par les partisans de l’ex parti Pastef au nom de la défense de leur leader, un leader qui n’a jamais manqué d’appeler ouvertement à l’insurrection. Aucun passage de l’analyse réputée neutre ne dénonce les nombreuses pertes en vie humaine et les dégâts matériels qui ont résulté du droit à la résistance galvaudée çà et là par l’idylle de Ziguinchor. Et que dire de la mort douloureuse de ces deux filles dont le souvenir hantera à jamais le sommeil de leurs proches ?
Pire encore, ce qui fait frissonner d’horreur à la lecture de l’article, c’est qu’il semble légitimer tous les moyens de conquête du pouvoir, fussent-ils, au péril de vies humaines. Sinon, comment comprendre qu’il puisse avancer sans broncher : « Maître Wade fut même accusé du meurtre d’un juge, président du Conseil constitutionnel, Maître Babacar Sèye. Son parti politique ne fut pas pour autant dissous et interdit ».
Est-ce à dire que le titre d’opposant politique confère tous les droits ? Quelle idée se fait-il de la justice ? Autant de questions qui démontrent à souhait l’option d’une cécité intellectuelle que l’éminent intellectuel a choisi délibérément.
Assurément, en lieu et place d’un lyrisme qui exalte les grandes valeurs, essuie les larmes des orphelins et rétablit la justice, pour emprunter les mots du professeur Makhaly Gassama, Felwine Sarr a préféré le lyrisme de l’autre versant. Ce dernier qui souvent patauge dans la fange, parvient avec efficacité, quand il se met au service des mauvaises causes, à faire accepter l’inacceptable, à valoriser ce qui n’a aucune valeur, à fouiner dans les profondeurs des instincts de l’homme… Ce lyrisme, pour paraphraser Makhaly Gassama, entretient un flou qui ne le rend pas moins efficace.
Justement, le flou dans l’analyse de Felwine, c’est entre autres, la volonté de vouloir déformer la réalité, en mettant sur un piédestal un général sans blessures de guerre. Ainsi, à défaut d’une analyse froide, l’écrivain laissera entendre, tel un cri un ralliement d’un militant de l’ex Pastef : « Le parti qui vient d’être interdit est celui dont le message recueille l’adhésion de la majorité de la jeunesse sénégalaise (70 % de la population) des classes laborieuses et d’une masse silencieuse qui aspire à un profond changement de mode de gouvernance. C’est un fait simple, visible, indubitable ; une évidence que la bonne foi ne peut nier, que l’on adhère ou pas à la vision politique du Pastef, il suffit d’ouvrir les yeux ».
Par cette assertion qu’il plaque comme une vérité biblique, Felwine, comme trompé par ses biais cognitifs, s’éloigne de la logique basique qui voudrait qu’en démocratie les élections soient les seuls baromètres objectifs pour évaluer un candidat. En fait, malgré sa percée politique, les différentes échéances électorales auxquelles le leader de l’ex Pastef a participé, ne font pas de son parti « celui dont le message recueille l’adhésion de la majorité de la jeunesse sénégalaise (70 % de la population) des classes laborieuses et d’une masse silencieuse qui aspire à un profond changement de mode de gouvernance.
Bien au contraire, cette image idyllique se fracasse au contact d’une analyse sans complaisance des résultats des différentes échéances électorales. A preuve, aux législatives de 2017, Ousmane Sonko est élu député au plus fort reste. A l’élection présidentielle de 2019, il se positionne à la troisième place, soit 15, 67% des voix, loin derrière Macky SALL et Idrissa Seck. Plus récemment sa coalition YAW n’a pas pu emporter la majorité des sièges à l’Assemblée nationale. C’est dire que l’affirmation de Felwine est fondée sur ses biais cognitifs qui, il faut le rappeler sont trompeurs. Or, l’activité de connaître ne peut laisser place aux émotions, sources d’illusions.
Abdoulaye Fall, Docteur en Droit privé à l’UCAD
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