Entretien : « Le dialogue, c’est la fausse réponse à la vraie réponse », Mamadou Sy Albert !

Quelles est votre observation sur le climat politique actuel ?

Disons que c’est confus ! Après les décisions du Conseil constitutionnel on attendait la date, également la mise en place des conditions matérielles et techniques de l’organisation du scrutin. Paradoxalement, on se rend compte qu’il y a des divergences profondes entre les acteurs politiques. Les candidats validés réclament une date et la tenue de l’Élection, les candidats recalés ou spoliés sont en train de ramer à contre courant. Certains veulent purement et simplement l’annulation du processus pour commencer un autre processus électoral.

Donc, le Chef de l’État c’est lui l’arbitre, l’autorité de l’Exécutif. Pour le moment, il propose un dialogue. Mais, on ne sait pas les termes de ce dialogue sur la date, l’organisation matérielle. Ou est-ce que c’est sur le processus électoral, lui-même ? En tout cas, ceux qui sont pour le report entretiennent une confusion généralisée. Maintenant les autres sont là, ils attendent la date et elle n’arrive pas. Et ces gens, je pensent qu’ils sont sceptiques par rapport au dialogue. On ne sait pas maintenant comment cela va se dénouer. Est-ce que le Président va prendre une date ou est-ce qu’il va subordonner au dialogue ? Voila mon observation sur la situation actuelle du pays !

Que pensez-vous de ce dialogue prôné par le Président Macky Sall ?

Pour moi, le dialogue c’est la fausse réponse à la vrai question ! En ce sens, on attend pas un dialogue. On attendait que le Président consulte les candidats, les acteurs politiques. Qu’il fixe à partir de ces consultations une date et un calendrier. Maintenant, le dialogue ce n’est pas la réponse à la question. Le dialogue va peut-être cristalliser les divergences par rapport au processus électoral. Même la date pourrait être compromise ce qui fait que je ne vois pas comment le dialogue peut apporter des réponses à une question précise. Et le risque qu’un dialogue aboutisse à une remise en cause des décisions du Conseil. Ma crainte c’est que le dialogue entretienne davantage la confusion qu’on rentre dans une crise institutionnelle. C’est un risque que le dialogue pourrait entrainer.

Le mandat de Macky Sall arrive à terme le 02 Avril prochain. Est-il possible d’organiser d’ici cette date une Élection présidentielle ?

Je crois que l’annulation de la loi votée récemment par l’Assemblée nationale ne signifie pas autre chose que le mandat du président s’achève le 02 Avril. One ne peut pas le proroger d’un mois ou d’un jour. Maintenant s’il n y a pas une Élection présidentielle on va vers un vide juridique. Le Président n’aura plus la légitimité pour faire même le discours du 03 Avril. Donc, on s’achemine vers un Président illégitime, parce qu’il ne respecte pas la Constitution. En tout cas, c’est une crise institutionnelle qui se dessine à l’horizon.

Une vague de libération de détenus politiques est notée depuis jeudi, tendant à décrisper le climat politique. Pensez-vous que ce geste soit salvateur ?

C’est vrai que le fait de libérer ces prisonniers, ça apaise le climat ! Effectivement, la tension baisse ! Mais la question de fond demeure. Tous ces gens ont été détenus pour des raisons politiques et juridiques. Et la tête de tout cela, c’est Ousmane Sonko ! S’il est en prison, je vois mal comment cela peut apaiser le climat social. L’apaisement complet serait de libérer tous les prisonniers politiques, y compris Ousmane Sonko et Diomaye Faye. Après la libération de ces prisonniers, il faut envisager un dialogue. En posant sur la table les questions suivantes : est-ce que le Pastef va retrouver sa légalité ? Sous quelle forme, ils vont retrouver leur légalité ? Comment vont-ils participer au jeu politique ? C’est le dialogue entre le chef de l’APR et Ousmane Sonko.

Quel devrait être le contenu du dialogue ?

Mais, à partir du moment où ils sont détenus à la suite d’évènements sociaux  et politiques, vous les libérez au nom d’un apaisement politique. Ce n’est pas pour des raisons humanitaires, vous les libérez pour des raisons politiques. Donc, pour aller jusqu’au bout de la logique, le principal concerné c’est le chef du Pastef et son chef. Si vous ne trouvez pas un accord, pour dire que voici l’aboutissement de cet apaisement, Le problème reste entier.

Rose Wardini s’est finalement retirée de la course. Votre commentaire sur  cette décision de l’ex-candidate accusée de parjure ?

Je crois qu’elle a fait preuve de courage, en acceptant de se retirer malgré la validation de son dossier. Je pense qu’aussi, elle est de bonne foi. Je pense que ça la libère. Elle n’a plus…en tout cas , elle n’est plus un cas de conscience. Elle s’est libérée démocratiquement de ses partisans. Elle fait preuve d’un respect à la Constitution. On attendait pas moins d’elle quand même. C’est une citoyenne et elle n’est pas tellement dans les querelles partisanes. Même si elle prétend apporter les preuve de sa bonne foi, elle a tourné la page et a mis tout le monde à l’aise.