(Entretien) : La polémique suscitée par la DPG du PM Sonko, passée à la loupe par Alioune Souaré
De l’avis d’Alioune Souaré, ancien parlementaire et Spécialiste en Droit parlementaire, » le Premier Ministre, en vertu de la séparation des pouvoirs, il devait se réserver de porter un jugement sur le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale « .
En effet, l’ancien parlementaire s’est réservé le droit de prendre le train en marche en ce qui concerne la polémique née au sujet de la Déclaration de Politique générale et les arguments que le PM Sonko a avancé pour ne faire sa Déclaration de Politique générale ou qui l’on poussé a ne pas s’y atteler devant l’Assemblée nationale.
Voici l’entretien !
La Déclaration de Politique générale est régie par la Constitution du Sénégal en son article 55, qui prévoit, ‘ après sa nomination, le Premier Ministre fait sa Déclaration de Politique générale devant l’Assemblée nationale ‘. Et on dit que la Déclaration est suivie de débat et qui peut, à la demande du Premier Ministre, donner lieu à un vote de confiance. Donc, la source c’est la Constitution ! La Déclaration de Politique générale est constitutionnalisée. Voilà, un peu, l’origine de la Déclaration de Politique générale !
Pourquoi une Déclaration de Politique générale pose-t-elle autant de problèmes et suscite tant de polémique ?
Apparemment, ça ne devait pas poser de problème. Vous savez, un pays comme la France que nous imitons beaucoup de nos activités ; en France, la Déclaration de Politique générale, c’est une tradition républicaine. Pour dire qu’ils sont arrivés à un niveau de maturité, au point qu’ils n’ont même pas besoin de l’inscrire dans le calendrier républicain. Avant, la DPG figurait dans la Constitution mais, ils l’ont enlevé. Cependant, il s’impose à tout Premier Ministre de faire une Déclaration de Politique générale. Si vous êtes nommés, immédiatement la semaine qui suit, vous êtes devant les députés. C’est la moindre des choses. En plus, il vient décliner la direction de votre politique.
Chez nous, c’est le Président qui décline la Politique de la Nation et c’est le Premier Ministre qui l’exécute. Mais, pour exécuter cette Politique définie par le Président de la République, il est nécessaire d’aller devant l’Assemblée nationale. Parce que, les députés représentent le Peuple. Je crois que la DPG est à la limite morale. Vous ne pouvez pas être élus, sans indiquer surtout aux populations, que vous êtes appelés à gouverner la direction que vous voulez prendre.
Le Premier Ministre n’a-t-il pas raison, en refusant de faire sa DPG si on sait que le Règlement intérieur du parlement est resté caduc depuis 2022 ?
C’est la où la difficulté se pose. En vérité, en vertu de la séparation des pouvoirs entre l’Exécutif, le Législatif & le Judiciaire et la Constitution est claire à ce propos. Si vous prenez l’article 6 de la Constitution, il est énuméré dans cet article : ‘ (…) toutes les Institutions de la République ‘.
La Présidence de la République est une Institution, l’Assemblée nationale, le Gouvernement, le Haut Conseil des Collectivités territoriales, le Conseil Économique Social & Environnemental, le pouvoir judiciaire qui commence par le Conseil constitutionnel, la Cour suprême, la Cour des Comptes et les Cours et Tribunaux. Ce sont là les Institutions énumérées dans l’article 6 de la Constitution.
De l’article 26 à l’article à l’article 52, tout est dévolu aux attributions du Président de la République. On vous dit ce que le Président a droit.
De l’article 53 à l’article 57, on vous dit les pouvoirs du Premier Ministre. À l’article 58, on vous parle des droits accordés à l’opposition. On ne parle même pas de chef de l’opposition, mais des droits dévolus à l’opposition.
A l’article 59, on te parle de l’Assemblée nationale jusqu’à l’article 66. À l’article 67, on vous parle des rapports entre l’Exécutif et le Législatif. Voila, un peu, comment la Constitution est agencée ! Ce sont 103 articles en tout dans la Constitution.
Généralement, sur les 103 articles, il y a toujours une loi qui vient compléter la mise en oeuvre. L’article 55 qui dit qu’ ‘ après sa nomination, le Premier Ministre fait sa Déclaration de Politique générale ‘ est complétée par les dispositions de l’article 97 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, qui est une loi organique. c’est dire que pour toutes les Institutions, c’est la Constitution qui fait un peu la péréquation même des responsabilités dévolues à chaque Institution.
Donc, la moindre des choses, c’est le respect qui s’impose entre les Institutions. Vous ne pouvez pas, aujourd’hui, être au niveau de l’Exécutif et donner un jugement sur une autre Institution.
Le Premier Ministre viole-t-il la Constitution, en refusant de présenter sa DPG devant les parlementaires ?
Le Premier Ministre, dans ses attributions qui sont définies par l’article 57, dans l’alinéa 2, il est dit : ‘ le Premier Ministre assure l’exécution des lois. Il dispose d’un pouvoir réglementaire, sous réserve des disposition de l’article 43 de la Constitution ‘. Cela veut dire que le Premier Ministre n’a pas le droit de violer surtout la Constitution. En vertu de la séparation des pouvoirs, il devait se réserver de porter un jugement sur le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. D’autant plus que le Règlement intérieur est une loi organique. Il n’y a que le Conseil constitutionnel qui peut se prononcer sur les lois organiques et constitutionnelles. Ce qu’il devait faire (le Premier Ministre), c’est de saisir le Conseil constitutionnel pour demander l’avis du président du Conseil constitutionnel sur le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Il pourrait dire, par exemple, ‘ Je veux faire ma DPG mais, il y a eu des interprétations ‘.
En ce moment, le Conseil constitutionnel lui dira la direction à prendre !