Contribution : Sidy Lamine Niass, Gloire au disparu Mohican de la sentinelle de la presse ! (Par Ismaila Aïdara et Maguette Mbengue)
05 ans déjà que le fondateur du Groupe de presse WALFADJIRI (Aurore en langue arabe) a tiré sa révérence. Dans la grande douleur de ses millions de lecteurs et d’auditeurs qui l’adulaient avec autant d’énergies, d’engagements inoxydables.
Sa disparition a laissé un grand vide dans le paysage médiatique sénégalais. Qu’on l’aime ou pas, Sidy était un personnage fascinant. Pionnier inamovible de la presse privée au Sénégal, sa plume et sa voix étaient d’une autorité inégalée.
Juriste, enseignant, journaliste et guide religieux, Sidy Lamine avait plusieurs cordes à son arc. Très engagé politiquement et défenseur de la cause palestinienne, le combattant Sidy, bien introduit dans les pays arabes, avait tous les traits d’un bon nomade qui savait dompter son environnement fut-il austère.
Emprisonné sous le régime du Président Léopold Sédar Senghor, le Mohican a été envahi par un sentiment de révolte, ce qui le poussa en Janvier 1984 à lancer le premier numéro du journal Walf. Un tournant nouveau et historique pour cet enfant de « daaras » (école d’enseignement islamique). Sidy a consacré toute sa vie à incarner la troisième voie royale, celle des contre-pouvoirs face aux différents régimes qui se sont succédé de Senghor au régime Macky SALL. Ses rapports étaient mitigés avec le Président Abdou Diouf, avant de revenir dans les bonnes grâces de ce dernier. Tout le contraire avec Abdoulaye Wade avec qui il a eu des relations parfois agitées.
Catalogué comme un “incompris“ dans sa démarche, Sidy Lamine Niass est resté droit dans ses bottes. Il n’a jamais raté l’occasion de tirer sur le gouvernement en place. Lequel, il avait participé urbi orbi à jouer sa partition dans les petits et moindres détails. Avec le Président Macky Sall aux commandes du pays en 2012, ce n’était pas le grand et parfait amour. On se souvient en 2016, lors du référendum constitutionnel, il avait donné champ libre et quitus aux partisans du « NON » dans les colonnes de sa tribune audacieuse, pointue et emblématique. Ce qui a valu le jour du vote, l’entrée en force des forces de l’ordre dans les locaux du groupe Walfadjiri, afin de suspendre la diffusion du direct. Un vif soutien des populations s’en est suivi jusqu’à ce que les rapports de force tournent à sa faveur.
Sidy Lamine fort, debout comme un roc avait averti sur la démarche du Président Sall. Très en verve, Sidy avait déjà annoncé les couleurs du gouvernement de Macky Sall, « on ne confie pas le pouvoir à un affamé… », ironisait-il.
Cheikhou Charifou, la grosse arnaque qui a agacé
Cheikhou Charifou ou « l’enfant-prophète », ce bout de muscles, natif de la Tanzanie, débarque au Sénégal en mai 1999. Les promoteurs bling-bling, accrocs des événements ostentatoires de sa visite de l’époque le présentaient comme un miraculé, un mystère de Dieu. Dans un pays comme le Sénégal, majoritairement musulmans, beaucoup y ont cru. Avant de déchanter. Seul Sidy Lamine Niass s’était insurgé contre le « traitement princier » dévolu à ce « charlatan » du lyrique. En dépit des sorties et d’attaques de la part de ses détracteurs. Sidy avait senti l’arnaque. Mais parmi cette foule d’ingrats, de serviteurs et de courtisans à col blanc, un homme se singularise. Sidy Lamine Niass dénonçait une opération malsaine à propos de cet enfant. Il y voyait une grosse arnaque et une grosse tentative de manipulation. Il dépeignait Cheikhou Charifou comme un “enfant- érudit“, comme il y en avait partout.
Aujourd’hui, l’histoire lui donna raison. Sidy Lamine Niass, même sous terre, continue de déranger le régime politique. Aujourd’hui son groupe de presse dirigé par son fils, l’avocat Cheikh Niass qui tient les commandes du cockpit, malgré la houle agitée tous azimuts, continue d’être traqué. En juin 2023, le signal du groupe de presse Walfadjiri a été suspendu pour une durée d’un mois. Une première au Sénégal. Une « coupure politique » dénonçait le PDG.
En ce jour où l’on célèbre l’anniversaire des 5 ans de la disparition de ce Mohican de la sentinelle du journalisme debout, Confidentiel Afrique ne pouvait rester insensible et aphone. Mogondé Sidy !
Par Ismaïla Aïdara et Maguette Mbengue de Confidentiel Afrique.